Grandir sans père, ça te fait te sentir différente. Différente dans le sens où à chaque réunion familiale, tu n'as qu'un parent présent. Dans le sens où chaque matin alors que tu arrives à l'école, tes camarades te demandes pourquoi ils n'ont jamais vu ton père. Mais que leur répondre ? Tu n'en sais rien, tu ne sais ni qui il est, ni à quoi il ressemble. Alors tu finis par t'enfermer dans les toilettes où les chaudes larmes coulent à flot sur tes joues. Parce que ça te fais mal. Puis un jour alors que tu t'es enfin fait à l'idée que tu n'aurais jamais de père, un homme sonne à la porte, ta mère faisait la cuisine alors c'était toi qui lui avait ouvert. En voyant ta bouille toute fraîche, tu avais pu remarquer de l'émotion dans son regard. Ta mère t'avais demandé qui venait de sonner. « Un monsieur, maman. »  Saisit de tes mots, il avait acquiescé tandis que ta maman vous rejoignait. En l’apercevant, son air s'était décomposé. Littéralement. Pourquoi ? [..] « Je te présente ton papa. » Tu avais dégluti difficilement alors que les larmes te montaient aux yeux et que tes joues changeaient de couleur virant au rouge pivoine. Tu n'avais pas bougé d'un pousse avant d'entreprendre une course improvisée pour te jeter dans ses bras. Bonheur. Après tout, tu n'étais qu'une gosse qui avait besoin d'un papa. Depuis ce jour là, il ne t'avais plus quitté, te rendant visite au moins une fois par semaine. Il assumait enfin son rôle. Tu étais pourtant bien naïve et loin de connaitre la vérité sur lui. Sur toi.

Un décès avait suffit à semer le trouble dans ta petite vie tranquille. Un putain de décès dont tu ignorais. « Ecoute chérie... » Un long silence s'en était suivi. C'était lourd. Tu ne comprenais rien à ce qu'il racontais et tu était loin de t'attendre à ce qu'il allait te dire ou plutôt à ce qu'il allait t'avouer. « Quand tu es née, ta mère et moi... C'est difficile à expliquer.. On ne s'attendait pas à avoir deux enfants. On en désirait qu'un tu vois, deux d'un coup, c'était bien trop de responsabilités.. » Tu le laissais continuer ses explications sans comprendre, sans saisir le but de sa confession ultime. « On a décidé de faire adopter l'une des deux, c'est tombé sur toi. Je sais, je sais.. On aurait jamais dû agir de la sorte, mais on avait pas le choix. Tu hantais mes jours et mes nuits. Ta bouille si innocente.. Je ne parvenais pas à me la chasser des pensées alors je suis revenu dans ta vie. J'aimerais que tu rencontres ta soeur.. » Un faux semblant de soupire s'échappait de ses lèvres. Tu ne pleurais pas, tu ne parlais pas, tu le regardais simplement. Comprenant peu à peu ce qu'il voulait t'avouer, tu t'étais approché de lui pour lui donner un coup dans le buste. La gorge te serrais et la colère noir envahissait tes pores. « Tu n'avais pas le droit de me dire ça, pas le droit de me faire ça ! Mais t'espérais quoi ? Je te déteste, toi et ta putain de famille.  » [...] « Écoute chérie..» Tu lèvais les yeux vers lui. Tu remarquais bien vite qu'un trousseau de clés pendais de sa main. Qu'est-ce qu'il allait encore faire. Il se contentais de te le tendre tout simplement. « J'ai bien réfléchis, je t'ai pris un appartement. » Une lueur d’espoir flambait en toi, s'était-il décidé à enfin te laisser vivre ta vie, en paix, sans ses histoires, sans interférer dans ta vie à présent toute chamboulée. « Ça te permettra que resserrer tes liens avec ta soeur. » Tu manquais de t’étouffer face à ses propos. Ta soeur ? C'est quoi ce délire ? Ce con vous avait acheté un appartement en commun. Tu allais désormais vivre avec une étrangère que tu détestais par dessus tout. Elle t'avait tout pris, du début à la fin. La vie que tu aurais du avoir, l'amour maternelle de ta vraie mère, une présence irréprochable d'un paternel. Oh oui, tu la haïssais, plus que tout.