La journée a mal commencé. Assurément. J'aimerais qu'elle se soit déroulée tout bien comme il le faut. Et pourtant... Tout est allé de travers. Réveil qui refuse de me réveiller, en retard pour mon entretien pour un boulot, que je n'aurais bien évidemment pas, mon pantalon qui se retrouve tâché d'un liquide verdâtre – sur un pantalon blanc, c'est moyen. Bref, tout va mal. J'espère juste que la soirée sera meilleure. J'ai décidé de sortir. Pour fêter mon échec cuisant. Et je sais exactement qui est le plus apte à me sortir cette idée que je suis doué en très peu de choses. Léandre. Il était bien le seul à pouvoir m'aider à me sentir bien. Il n'était pas vraiment un ami. Ni un petit-ami. Un amant plutôt. Un amant. Oui. Peut-être le seul et unique. Je ne sais pas vraiment comment définir notre relation... Je t'aime, moi non plus. Attrapes-moi si tu peux. Je ne sais vraiment pas. Je dirais qu'on est passé à la phase « j't'apelle quand j'ai besoin de sexe. » Oui c'est ça. Nous sommes des jouets l'un l'autre. Ceci dit, nous ne le sommes que lorsque l'alcool a décidé de s'infiltrer dans nos corps. Or de ces moments, nous ne sommes que Bryson et Léandre. Deux personnes tout à fait normales. Léandre n'a pas la majorité. Et c'est bien dommage. Désormais je serais en délit, si Léandre n'était pas consentant. Mais qu'importe. Pour le moment, je me contente de l 'appeler, de lui donner un lieu de rendez-vous, de le faire rentrer, de boire et de trouver un coin tranquille. Nos soirées sont rythmées par cette envie frénétique du corps de l'autre. Je ne saurais expliquer pourquoi et comment. Souvent nous nous retrouvons dans une boite de nuit, où voir deux mecs se rouler des galoches n'est pas forcément nouveau. Tout le monde de roule des galoches dans ce genre de boites de toute manière. Personne ne s'offusquera de me voir approcher mes lèvres de celles de Léandre, puis de les coller avec un désir feint.
Ce soir, nous nous retrouverons. Nous boirons à ne plus nous souvenir où nous sommes – et avec un minimum de chance aucun de nous ne vomira, Léandre a assez de contrôle sur lui-même et sa capacité à boire, pour ça. Puis je déposerais mes lèvres sur les siennes. Et tout recommencera. Pas de roses, de dîner romantique. On est jeunes. Pas besoin de ces conneries à trois francs six sous. Et à vrai dire, après toutes les nuits que l'on a passé ensemble, je ne pense pas que Léandre souhaite une quelconque romance à l'eau de rose – beurk, c'est tellement pathétique – ou un dîner aux chandelles sur un balcon d'un restaurant qui me coûtera le salaire d'une vie. Nous ne voulons pas de ça. Je ne veux pas de ça. Ca n'a aucun intérêt de faire ce genre de trucs. J'ai pas douze ans, lui non plus. Nous n'en avons pas non plus quarante. Faut arrêter les conneries. Et passer à l'action. C'est le plus important. Nous nous sommes rencontrés lors d'une soirée. Comme celle qui va avoir lieu. Sauf qu'il n'y avait que des ados à peine sortis de la puberté là-dedans. Je ne suis pas fan de ce genre de soirées. Mais je n'y allais pas vraiment pour rencontrer des gens sympa. J'y allais surtout pour boire et baiser – autant emprunter les mots vulgaires pour le dire, n'est-ce pas... Je n'avais aucune intention de prendre par la main un des petits gosses qu'il y avait à cette fête et lui montrer la marche à suivre. J'y allais pour boire. Comme à mon habitude, une fois la troisième bouteille de vodka entamée, je ne ressentais toujours aucun picotement dans la gorge ou autre. Je tiens très bien l'alcool. Léandre était également en train de boire. Je l'ai abordé. Tout est allé très vite. J'étais encore assez sobre pour me rappeler de mon prénom, de mon nom également. Lui était assez sobre pour savoir que j'étais là pour son corps et pas apprendre des détails inutiles et sans intérêts sur sa vie, sur ses parents ou sa copine qui l'avait lâché deux semaines plus tôt – croyez-moi, c'est déjà arrivé. Je ne voulais qu'une chose. Lui. Tout était allé très vite... Je ne me rappelle plus des détails. Mais nous avions trouvé une chambre très prêt de la boite de nuit. Tout avait été si vite. Nos deux corps se mélangeant dans des effluves. Nos deux lèvres se touchant. Mes mains sur sa peau brûlante. Les siennes sur la mienne. Ses petites manies à me caresser les cheveux aussi sobrement. Ses yeux me scrutant ça et là. Tous les détails, je ne les ai pas en tête. L'important est que tout ceci s'était passé. Assez rapidement, je dois l'avouer. Quoique. Cette fois là, nous avions bien tenu une bonne heure. A peu près comme les fois suivantes. A vrai dire, Léandre restera à ce jour la meilleure personne avec qui j'aurais échangé sexuellement.
Je prend mon téléphone en main. Je regarde l'écran, presque neuf, une micro-rayure par-ci, une micro-fissure par-là. Je tape mon code – qui n'est connu que de... de personne au final. Très rapidement, je trouve le nom de Léandre dans le répertoire et commence à écrire un message.

Citation :

Ce soir. Comme d'habitude. 23H30. Sapes-toi comme d'habitude. Pas besoin de sortir l'artillerie lourde. Renvoies-moi une confirmation;).

Tout allait pouvoir débuter.
Pendant ce temps, je pouvais me préparer. Un regard à l'heure. Vingt-et-une heures. Parfait. Le temps de prendre une douche et me préparer sans sortir artillerie lourde. Je pose mon téléphone sur la table et enlève ma bague, accrochée à mon annulaire droit. Je la pose également sur la table. Je déboutonne ma chemise, qui git désormais à terre, comme un vieux torchon. Je me dirige vers la salle de bain. Arrivé devant la porte, j'ôte le reste de tissus qui dépose sur mon corps une lourdeur sans nom. Je me retrouve nu et me dirige dans ma douche. Très vite je règle la température de l'eau et me retrouve sous une chaleur assez agréable.
Tout va très vite, je n'ai jamais été très long pour me préparer. Une bonne douche d'une quinzaine de minutes. Puis dix minutes de plus pour m'habiller. C'est tout ce qu'il me faut pour être aussi éclatant qu'un sourire colgate...

[…]

Je me retrouve devant la boite. A attendre avec impatience Léandre. Il devrait venir. Je n'ai pas reçu de confirmation mais il fait toujours ça. Il ne confirme pas et arrive quelques minutes après moi généralement. Je le vois qui avance, dans la brume du soir. J'ai une ruse bien à moi pour faire rentrer Léandre. Il n'est pas majeur. Je dois donc le faire rentrer en douce. Je lui ai donc fabriqué une fausse carte d'identité. A k a, t'es dans un truc select, et tu ruses. Voilà.
Il arrive devant moi. Je m'avance. « T'es prêt à un peu de fun ? Pour remplir nos vies pathétiques ? »

Le portable posé sur la table vibra, le bruit amplifié par le reposoir fit tressaillir le jeune brun étendu dans le lit. Il s'en occupera plus tard. Torse nu il avait les bras en croix et se reposer sur son lit, le regard perdu il fixait le plafond blanc, comme tout le reste de la maison. C'était le week-end et il s'ennuyait, c'était presque irrationnel en y pensant et pourtant. Il ne comptait pas sortir ce soir, de toute façon il n'avait rien de prévu à la base. Une barbe de deux jours se profilerait sur la totalité de sa mâchoire, il n'avait pas les cernes qui caractérisaient généralement les lendemains de soirée, cette fois il avait juste dormi. Il soupira et releva son torse du matelas si attrayant. Avec lassitude il se traîna jusqu'au meuble, prenant son smartphone il déverrouilla l'écran. Un sourire plana alors sur ses lèvres, finalement cette dernière soirée ne serait pas si reposante. Il s'agissait de Bryson.
« Ce soir. Comme d'habitude. 23H30. Sapes-toi comme d'habitude. Pas besoin de sortir l'artillerie lourde. Renvoies-moi une confirmation;). »

Léandre ne comptait pas répondre, il se pointerait juste. Bryson le savait et il n’attendait pas réellement de lui une réponse. Qui était-il au juste ? Un ami, un amant ? Ses pensées concernant l’adulte étaient plus que troubles. Leur relation était difficile à décrire même si elle se rapprochait très certainement d’un plan, mais au fond c’était légèrement plus compliqué. Certains soirs comme celui qui allait arriver ils se retrouvaient, dans une boite, une soirée peu importe, c’était Bryson qui ouvrait le bal. Ils buvaient, ils s’amusaient et ils finissaient toujours dans le même pieu. Allez savoir comment et pourquoi ils étaient attirés l’un vers l’autre. Lorsqu’ils étaient sobres ils se connaissaient à peine mais dès que l’alcool agressait leur enveloppe physique ils fusionnaient presque. Tous deux joueurs ils s’abandonnaient avec engouement à cette distraction charnelle lorsqu’ils sortaient ensemble. Il n’y avait aucun sentiment dans toute cette histoire, Léandre n’en avait aucun et il savait pertinemment que Bryson était dans ce même cas. Ce soir annonçait déjà une fin alléchante, emmêlé dans ses bras, collé à son corps il ne pensait plus à rien, des problèmes qu’il avait ou autre. L’avantage avec Bryson était qu’il avait vingt et un ans passés, s’occupant toujours des soirées où ils se donnaient rendez-vous le fait de connaitre l’homme donnait à l’étudiant des possibilités presque infinies. Dans un sens c’était certainement pour cette raison que Léandre s’était tourné vers Bryson qui à vrai dire ne l’aurait pas intéressé en temps normal. Toutefois une véritable addiction s’était emparée de lui et il devait à présent avouer qu’il attendait avec hâte mais aussi avec anxiété ces soirs-là. 23H30 donc. Il était déjà tard mais c’était le début de soirée, il lui restait donc du temps. Il reposa le portable sur la table, il aimait parfois ne plus devoir à s’en préoccuper. Sortant de sa chambre il traina dans le long couloir qui serpentait au travers toute la maison, il rejoignit le salon où un grand écran plat était disposé face à un canapé de plusieurs mètres de long. Il alluma la télévision tout en s’allongeant sur le cuir souple tout à fait confortable avant de fermer les yeux. 22H30. Merde.. il s’était endormi, à une demi-heure de la boite où les deux hommes se donnaient rendez-vous habituellement, il n’avait plus beaucoup de temps pour se préparer. Il regagna sa chambre et fila dans la salle de bain. Prenant rapidement une douche il enfila pour habits un pantalon de couleur beige, une chemise bleu clair sur un tee-shirt blanc de marque, le tout accompagné de chaussures montantes. Voilà, il attrapa son portable, ses clés de voiture, se mit un coup de parfum et ferma la porte de la chambre.

Le tableau de bord de l’aston martin affichait bien 23H30. C’était l’heure, Léandre s’était garé sur un parking à une centaine de mètres de la boite de nuit. Son siège rabaissé il fumait tranquillement un joint qu’il venait tout juste de finir de rouler. Le stress qui s’empara toujours de lui lors des moments comme ça s’évanouit aussitôt et il se détendit. Bryson pouvait encore attendre quelques minutes. Il ouvrit sa portière, jeta le reste des feuilles par terre et marcha dans cette nuit d’été. Le blond était là, il l’attendait, une carte dans la main, sûrement son laissez-passer pour la boite. « T'es prêt à un peu de fun ? Pour remplir nos vies pathétiques ? » Léandre ne fit qu’hocher la tête en s’emparant de la carte qu’il lui tendait. Un clin d’œil accompagné d’un sourire carnassier suffirent à faire comprendre à Bryson qu’il était heureux d’être là. Côte à côte ils rejoignirent l’entrée de la boite. « Vous êtes seuls ? » Le videur. Soupirant Léandre déposa gentiment un gros billet dans la main de la montagne de muscles. « Allez-y, bonne soirée. » Il était encore tôt, ce n’était pas la folie à l’intérieur. Comme à leur habitude ils prirent une table vip commandant par la même occasion un seau. Bientôt ils se retrouvèrent tous les deux avec cinq bouteilles devant eux. Prenant directement celle de Tequila il adressa un sourire joueur à Bryson. « Que cette soirée soit mémorable. » Elle le serait et ils le savaient. Buvant directement dans la bouteille il s’en enfila une grande partie tandis que son compagnon prenait autre chose. Bientôt l’ambiance fut meilleure dans la boite, le Dj était bon, les jeux de lumière aussi et l’alcool coulait à flot. D’un commun accord ils se séparèrent, l’alcool trainant dans son sang il finit la bouteille de Tequila et s’empara de celle de champagne. Alors qu’il dansait, la bouteille dans la main ; il devait être déjà trois heures ; une fille se glissa sous son bras prenant le champagne et buvant une longue gorgée. Léandre la regarda avec un sourire. « Qu’ai-je en échange ? » « Qu’est-ce que tu veux ? » Le jeune l’homme s’empara de ses lèvres et elle lui répondit de manière sauvage. Ainsi la fête continua. Buvant toujours autant Léandre déboursait des centaines de dollars, ce n’était rien pour la fortune qu’il possédait. Il continua de danser, embrassa d’autres filles, en dragua plusieurs. Il tomba alors sur lui. « Te voilà. » Avec ce sourire vorace qu’il arborait à chaque fois que ses pulsions arrivaient il posa ses deux mains sur son visage tandis qu’il l’embrassait avec fougue.