Dale & Drizzle. MOOD IT CHANGES LIKE THE WIND HARD TO CONTROL WHEN IT BEGINS.

C’était une des premières fois que tu manquais le bal du Homecoming. Tu t’étais toujours plus ou moins sentie obligée d’y aller en compagnie de cavaliers ennuyeux à mourir, de faire bonne figure, la seule bonne chose étant peut-être le fait d’y retrouver tes amis. Ce soir, tu étais censée débarquer avec Dale Freeman, alors qu’il était venu te chercher en limousine. Au final, vous aviez rebroussé chemin après vous être avouez que vous n’en aviez pas envie autant l’un que l’autre. Tu trouvais ça étrange, presque déconcertant de le suivre comme ça, alors qu’il t’avait proposé de venir passer la soirée chez lui sans ses parents, te promettant même de ne pas chercher à te déshabiller. Tu te disais que la cocaïne y était peut-être pour beaucoup dans son attitude vraisemblablement et qu’une fois que les effets se seraient estompés, se serait différent, sans savoir dans quels sens. Là encore tu ne cherches pas à te poser de grandes questions. Le pire étant que tu avais passé une bonne soirée et que tu ne regrettais pas au final de t’être dérobée et d’avoir choisi Sea Village plutôt que le gymnase du lycée. Mais ça, tu ne lui avais pas dit. Comme pour le moment que tu avais apprécié devant le film que vous aviez regardé et qu’il t’avait laissé choisir, l’escapade culinaire dans sa cuisine, les pancakes au sirop d’érable pour toi, à tout et n’importe quoi pour lui, le joint que vous aviez fumé les pieds dans la piscine de son immense jardin en balançant sur le bal du Homecoming, et le fait qu’il avait même réussi à te faire rire. On t’aurait dit ça il y a plus d’une semaine, tu ne l’aurais pas cru. Surtout avec lui. Ce soir là, t’en avais presque oublié à quel point tu avais souvent du mal à le supporter en temps normal. C’était différent. Comme si le lendemain serait différent. Tu essayes de ne pas y penser, de reporter cette discussion avec toi-même plus tard parce que tu sais que ça te ferait profondément flipper et que tu deviendrais moins ouverte. Tu ranges alors tes inquiétudes au fin fond de ton esprit. L’heure défile à une vitesse impressionnante si bien que tu es encore chez lui bien après une heure du matin. Ou deux même trois, tu ne sais pas. Tu n’as plus la force de rentrer chez toi, où en plus tu sais que tu seras seule alors il te propose de dormir ici. Après quelques pauvres secondes d’hésitation, tu finis par accepter enfilant un de ses t-shirts devant lui, par-dessus tes sous-vêtements. Après tout, ce n’est pas comme s’il ne t’avait jamais vu nue de ta vie. Tu t’allonges à ses côtés, dans la pénombre. Tu n’es même pas stressée qu’il se passe quelque chose car tu sais que ce n’est pas le cas. Tu te contentes de regarder le plafond gardant le silence pendant un long moment. « C’est vraiment bizarre. De se retrouver là, je veux dire. » Chuchotas-tu finalement en le rompant. Tu marques un pause. « Merci.. » Tu ne sais pas pourquoi tu lui dis ça. Peut-être pour la broche, pour t’avoir fait éviter le Homecoming, t’avoir invité ici. Un tout. Tu affiches un léger sourire. « Tes parents préfèrent s’absenter plutôt que de nous voir ensemble ? Waw. » Même s'ils vous pensaient certainement au lycée ce soir-là, tu ne doutes pas un instant qu'ils puissent jubiler. Tu te tournes alors vers lui, allongée sur le côté. « Je t’ai jamais demandé ce qu’ils faisaient d'ailleurs. »

Je n'étais plus sous l'emprise de la cocaïne depuis un petit moment, j'avais hésité à en reprendre comme pour ne pas gâcher le moment, et puis finalement, m'amusant bien avec Drizzle, j'avais renoncé. Après avoir décidé sur un commun accord de ne pas nous rendre au Homecoming, nous avions passé une contre-soirée ensemble plutôt agréable. Je me fichais pas mal personnellement de boycotter cet évènement sans intérêt et au fond, j'étais satisfait de voir que Drizzle se rangeait du même côté de moi. J'avais juré de ne pas tenter de la déshabiller et m'étant fait à l'idée que nous ne ferions rien ce soir là, je n'avais fait aucune allusion obscène, perverse ou déplacée, me contentant d'apprécier simplement le moment. Il était rare que j'apprécie réellement quelque chose, j'avais tendance à être très imperméable à ce qui pouvait m'arriver, les émotions glissaient sur moi comme la pluie glisse sur les vitres sans jamais atteindre les personnes derrière. Nous avions regardé un film qu'elle avait choisi et longtemps je m'étais abstenu de tout commentaire quant au choix contestable qu'elle avait fait. Nous avions regardé le film accompagné de succulent cupcakes, je m'étais littéralement gavé et j'avais faillit m'endormir devant le film, complètement assommé par la digestion de ce festin. Je m'étais finalement ressaisi, nous avions alors fumé un joint au bord de la piscine, discutant de tout et de rien de façon naturelle. Etonnante mais naturelle, j'étais curieux de découvrir cette fille qui était à côté de moi, comme si c'était une autre Drizzle Burrows, plus docile, moins secrète. J'avais l'impression qu'elle s'ouvrait petit à petit, comme un bourgeon qui fleurit lentement et laisse apparaître progressivement toute sa splendeur. Nous avions finalement décidé d'aller nous coucher, Drizzle avait la flemme de rentrer chez elle et je lui avais donc proposé de rester ici pour la nuit, elle accepte après quelques secondes d'hésitation. Je m'allongeais alors dans le lit, vêtu simplement d'un boxer, couvert à moitié par un drap et décidais de me perdre dans mon mutisme originel. C'était un moment paisible dont j'avais envie de profiter. Drizzle mit fin au silence ambiant pour m'avouer qu'elle trouvait la situation bizarre, je ne répondais pas, les yeux perdus dans les profondeurs de l'obscurité de la chambre très peu éclairée. Je passais simplement mes mains sous ma tête avant qu'elle ne reprenne et ne me remercie. La pareille, je ne cillais pas et restais parfaitement immobile. Elle partit finalement sur un autre sujet et décida de me questionner sur mes parents. Je pinçais les lèvres, peu motivé à lui faire part de ma vie familiale minable et surtout fausse. « Mon père produit des films, son truc c'est Hollywood mais ma mère refuse qu'il y mette les pieds sans elle, on vivait là bas avant. Puis elle flippait trop à cause de toutes les tentations.. Du coup on est venu là car elle pensait pouvoir mieux le tenir en laisse ici. Et puis elle, elle dirige une marque de prêt à porter. Un truc genre.. Wet Seal. Des fringues pas trop chères, accessible à tous.. Ce qui est assez ironique sachant qu'elle porterait jamais les vêtements qu'elle vend et qu'elle préfère mettre du Prada, Gucci, etc... » après ce long récit, je scellais à nouveau mes lèvres pour réfléchir à tout ce que j'avais dit. S'il y avait une chose dont j'aurais put me plaindre, c'était mes parents. Ils faisaient semblant d'aller bien devant tout le monde, alors qu'en réalité... C'était loin d'être le cas. Je soupirais longuement avant de tourner la tête vers Drizzle. « J'espère vraiment ne pas finir comme eux. Et toi ? Qu'est-ce qu'ils font? T'as pas l'air de porter beaucoup ton père dans ton coeur à ce que j'ai compris.. »

La situation reste insolite. En l’espace d’une soirée, vous aviez réussi à éviter tous conflits et remarques se voulant blessantes ou déplacées sur l’autre. Tu t’étonnais. Le lendemain sera sans doute différent, peut-être que les choses reprendront leur cours normal, mais en attendant, tu avais passé une bonne soirée et tu n’avais pas cherché à te prendre la tête pour quoi que ce soit, mis à part le film que tu avais choisi quelques heures plus tôt. L’heure plus que tardive vous avez mené jusque dans sa chambre où vous vous étiez finalement allongés dans son lit, la pénombre et le silence vous entourant. Tu le rompis brusquement en le remerciant furtivement avant de dévier le sujet sur vos parents. Peut-être n’était-ce pas un choix judicieux. Parler des tiens n’était pas la meilleure chose. Tu lui poses alors la question, parce que tu te rends compte que tu ne sais rien. La personne avec qui on aimerait te voir être, peut-être même pousser à l’extrême et te marier, fonder une famille, bref, un tas d’évènements en quoi, à votre âge, personne ne pense pour le moment. Il te parle alors de son père producteur de films, chose qui a le don de t’impressionner, et sa mère dirigeante d’une marque de vêtements. Tu esquisses un léger sourire à sa dernière remarque. Tu n’étais même pas certaine qu’il veuille s’engager dans cette discussion, surtout sur sa vie, sa famille. Mais il continue de t'étonner, en te parlant de tout ça. Tu fixes son profil avant qu’il ne se tourne vers toi. « J'espère vraiment ne pas finir comme eux. Et toi ? Qu'est-ce qu'ils font? T'as pas l'air de porter beaucoup ton père dans ton coeur à ce que j'ai compris.. » Tu fermes les yeux un instant en soupirant. Que révéler sur tes parents ? Autant l’un que l’autre ? Tu étais en train de te dire que tu ne pouvais pas tout déblatérer à Dale comme ça. Parce qu’en général tu n’en parles pas. Mais c’est toi qui as avancé la conversation et lui t’a répondu. « C’est un peu compliqué, disons.. Mon père est avocat, mais toujours en déplacement. Il n'est jamais là, et pourtant même à distance, il arrive à me dire quoi faire de ma vie.. J’ai jamais eu vraiment le choix, tu vois..» Tu souffles. Si tu t’engages là-dedans, si tu commences à dire ce que tu ressens, tu pourrais ne plus en finir. Tu retournes la tête en fixant le plafond. Tu hésites à parler de ta mère. Parce que le sujet est épineux, te dépasse et que tu ne réagis jamais calmement quand tu as le malheur de la mentionner. Et surtout, parce que c’est Dale et que lui parler de ta vie ne rentre pas spécialement dans tes habitudes. Mais finalement, s'exprimer, comme ça dans le noir devient subitement plus simple. « Ma mère.. ça va te paraitre bizarre mais.. J’en sais rien. Enfin, la dernière fois que je l’ai vu, elle avait perdu son boulot. Mais c’était il y a trois, quatre ans, et on s’était à peine croisées.. En fait, elle est restée à Sydney quand ils ont divorcés. Mon père est parti vivre ici avec ma sœur et moi. Je devais avoir sept ans par là.. » Tu avales ta salive. C’est plus douloureux d’en parler que tu ne le pensais, alors tu t’arrêtes à ces presque banalités, revenant sur la famille de Dale. « Pourquoi est-ce que tu ne veux pas devenir comme eux ? Je veux dire, ils ont l'air d'avoir réussi. Un père producteur à Hollywood, c'est pas rien.. » Mais dans un sens, tu le comprenais, parce s'il y avait bien des personnes à qui tu ne voulais pas ressembler, c'était bien tes parents.

Drizzle se confia finalement à son tour et je l'écoutais d'une oreille attentive, les yeux rivés sur la grande fenêtre de la chambre qui donnait sur la rue tranquille de Sea Village dans laquelle j'habitais. Son père était absent mais prenait un malin plaisir à décider de ce qui était bon ou non pour elle, je pinçais les lèvres, me sentant visé directement par ses propos. Nos parents respectifs s'étaient mis d'accord pour nous mettre ensemble. Ils espéraient nous voir mariés et heureux, un espèce de mariage arrangé qui plairait à tout le monde. C'était loin d'être le cas et si je m'étais toujours payé la tête de Drizzle je réalisais à présent qu'elle avait peut être réellement souffert de la situation. Pas forcément de mon attitude de petit con, mais plus du comportement de son père qui utilisait mon nom dans l'espoir de garantir à sa fille un avenir heureux. Ou au moins, un avenir riche car avec un nom comme le miens, on y échappait pas. Drizzle avait sans doute envie de sortir avec qui elle le désirait, comme n'importe quelle fille, elle ne désirait pas se plier aux ordres de son père, surtout concernant son petit ami, c'était logique. Et elle se retrouvait coincée à devoir supporter un type comme moi. Je me demandais si elle ne m'avait pas sur le dos, vers quel genre de mec se serait-elle tournée. Au final je ne la connaissais pas beaucoup, je ne savais pas ce qu'elle aimait... A part la téquila, ni ce qui l'intéressait et je crois qu'elle en savait autant pour moi. Elle connaissait mon goût prononcé pour la mary-jane, pour la coc, mais rien d'autre... « Pourquoi est-ce que tu ne veux pas devenir comme eux ? Je veux dire, ils ont l'air d'avoir réussi. Un père producteur à Hollywood, c'est pas rien.. » me demanda-t-elle pour retourner la conversation vers moi. Je restais un moment silencieux, considérant sa question et tentant de trouver la réponse la plus adaptée. Mes parents avaient tout pour eux en apparence. Ils étaient riches et ils avaient professionnellement réussit. Ils avaient une maison dans le quartier le plus cher d'Oceanside, ils se plaisaient à organiser des diners et cocktails mondains pour montrer leur bonheur, mais tout ça.. C'était des conneries, ils se mentaient à eux même et ils mentaient aux autres. Vraisemblablement, j'étais le seul à connaître les dessous de cette mascarade: un père accroc au boulot se droguant pour ne pas ressentir les mauvais effets du stress et se baladant régulièrement dans les rues sombres d'Oceanside au bord de sa mercedes, à la recherche d'une prostituée, d'une escorte... D'une compagnie plus agréable que ma mère qui se dopait aux médicaments, totalement dépressive. Qui l'eut crut ? « Mh... Ma mère s'efforce de sauver les apparences parce que ça la console d'avoir au moins l'air heureuse aux yeux des autres. Mais c'est loin d'être le cas. En fait, elle est probablement la personne la plus triste que j'ai jamais vu de ma vie. » ma mère était aussi la seule qui réussissait à m'atteindre, dans son grand malheur, j'arrivais à percevoir quelques bribes d'émotion, elle me faisait de la peine et je savais qu'elle n'avait pas mérité ça, elle qui avait tout fait pour sauver son mariage et pour continuer de vivre son rêve d'une belle et heureuse famille. Je la voyais s'enfoncer dans la désillusion et la seule chose qui lui permettait d'être un peu heureuse maintenant c'était ses médicaments ou les quelques moments que je lui permettais de passer avec moi. J'avais l'impression d'être pour elle un soulagement, le sentiment qu'elle n'avait peut être pas tout raté et c'est pour elle que d'une certaine façon je ne m'autorisais pas à échouer. Car ce serait également un échec pour elle et elle ne le supporterait probablement pas. « Et lui c'est un espèce de c*nnard narcissique..A sa place j'ferais quelque chose pour que la situation empire pas mais il a abandonné depuis longtemps. C'est un lâche. » Je soupirais et me redressais pour attraper le paquet de cigarette sur la table de chevet, je m'en allumais une et restais assis le temps de la griller. Je tirais plusieurs bouffée dessus avant de reprendre. « Comme quoi on est pas si différent que ça au final... »

C’était la première fois que tu en entendais autant sur la vie de Dale et sur sa famille. Si tu devais résumer tout ce que tu avais appris sur le brun jusqu’à présent, tu n’étais pas certaine de tenir très longtemps. En fait, tu n’avais jamais cherché plus loin que l’antipathie que tu lui vouais dès le début. Le voir ainsi « s’ouvrir » d’une certaine manière, même sur un sujet tel que vos parents te paraissait à la fois nouveau et frustrant. Tu n’aimais jamais t’étendre à propos d’eux, tout simplement car tu considérais ça comme une faiblesse et la dernière chose que tu désirais était bien montrer que tu pouvais être plus fragile que tu en avais l’air. Surtout à Dale, bien que plus d’une fois tu t’étais perdue en sa compagnie. Mais dans le noir, il semblait beaucoup plus simple de se confier. Révéler ce dont était fait votre quotidien. Tu n’aurais d’ailleurs pas soupçonné tout ça dans sa famille, rien que dans la façon dont il parlait de sa mère, puis de son père. Sa mère que tu voyais si fraiche, si souriante quand elle venait diner avec son mari chez vous. Tu ne t’étais pas réellement posé de questions à son propos finalement. Parce que oui, en réfléchissant aux paroles de Dale, il semblait que tout allait bien. Tu vois les Freeman différemment. Pas en mal, simplement d’un autre œil. Tu acquiesces alors, attentive à ses propos, tout en sachant qu’il ne te verrait pas dans la pénombre. La description qu’il faisait de son père te rappelait étrangement le tien. L’abandon. Car tu es certaine que le tien aussi avait abdiqué depuis un long moment. T’avais laissé toi et ta sœur, chez vous, à vous prendre en charge. Prendre en charge des choses qu’un jeune de dix-huit ans ne devrait pas même se soucier. Pour te dicter les choix que tu devais faire dans ta vie, alors oui, là il répondait présent. Souvent. A distance. Mais pour le reste, il n’y avait vraisemblablement plus personne. Au fond, tu te sentais paumée. Car tu aurais préféré ne pas avoir de parents plutôt que de te soucier autant d’eux. De savoir quand est-ce que tu recevrais un coup de fil de ta mère au moins pour ton anniversaire, pour te demander comment tu allais après avoir été malade, après n’importe quelle peine qui soit. N’importe quoi. Juste un signe. Mais rien. Elle te détestait au fond, d’être partie avec ton père à Oceanside, tu le sentais. Mais ressasser tout ça ne t’aide pas et les mots restent étrangement bloqués dans ta gorge. Tu le sens se relever, et s’allumer une cigarette. « Comme quoi, on est pas si différent que ça au final.. » Tu souffles un peu, laissant planer le silence quelques instants. Le temps de réfléchir. Ces mots sonnent bizarrement à tes oreilles mais au fond, tu sais qu’il a raison. « Qui l’eût cru ? » Pointe d’ironie dans la voix, pourtant le cœur n’y est pas, tu n’as pas envie de rire. Tu te relèves alors à ses côtés en te reprenant. « Enfin, nous aussi, on est censé faire comme si tout allait bien. » Tu ramènes tes genoux contre toi avant de le fixer. Vous trouver dans un lit, comme ça, avec cette certaine distance n’est pas dans vos habitudes. « Je ne sais pas si ils s’en rendent compte. Enfin, est-ce que mon père changerait d’attitude si j’arrivais à lui dire ? J’en sais rien. Je pense pas. Il est trop occupé pour s’encombrer réellement de ses filles sûrement.. » T’as presque l’impression de te faire les questions-réponses toute seule. « A part pour savoir qui je dois fréquenter. Les fortunes familiales, ça, y a rien de plus précieux à ses yeux. Tu crois qu’ils arriveront.. à leurs fins ? Avec nous je parle. » Ça t’avait quelque peu échappé et tu te mords alors la lèvre.

J'allumais une cigarette, la fumée qui me remplit la gorge et les poumons me fit le plus grand bien, j'eus rapidement la vague impression de planer à nouveau. La conversation était bizarre, je n'avais pas l'habitude de discuter dans le calme avec elle. Ni même de discuter tout court en fait. On préférait souvent s'envoyer des pics, mais cette jolie soirée se terminait sur une discussion des plus sérieuse. Sur le ton de la confession, nous avions parlé de nos parents. J'avais avoué sans mal ne pas vouloir devenir comme mon père, même si j'étais conscient d'y être condamné d'une façon ou d'une autre. Drizzle se redressa également, je la regardais rapidement avant de perdre à nouveau mon regard dans l'obscurité, je ne savais pas trop où cette soirée allait finalement nous mener, je ne savais même pas si ça allait aboutir à quoi que ce soit et je n'arrivais pas à comprendre pourquoi je lui avais dit tout ça. C'était comme si j'y avais été poussé. Elle s'était confiée et j'avais fait de même et les choses semblaient à présent plus simple, comme si nous venions d'assembler les pièces d'un puzzle et qu'on arrivait finalement à se comprendre. J'étais un peu perdu, penaud. En fait je ne réfléchissais pas tellement à ce qui était entrain de se passer, j'étais bien plus du genre à agir et parler sur un coup de tête sans penser aux conséquences de mes actes. La vie était beaucoup plus simple ainsi, les choses bien moins lourdes. Mais ce n'était pas dans un soucis d'alléger mon existence que j'agissais ainsi. Non. En fait je n'en avais tout simplement rien à foutre. « Enfin, nous aussi, on est censé faire comme si tout allait bien. » dit Drizzle après un long silence. Je tirais sur ma cigarette presque terminée à présent. « Ah bon ? Tu trouves que j'ai l'air de respirer la joie de vivre ? Je joue pas. Je laisse pisser c'est tout. Y a rien à faire de toute façon. » lui répondis-je sur un ton résigné, un peu nerveux. Elle partit finalement dans un long monologue, s'interrogeant sur ce qu'elle devait faire ou non par rapport à son père. Des questions rhétoriques auxquels elle s'empressait de répondre elle même.Je restais donc silencieux, ne l'écoutant plus qu'à moitié, mes pensées se perdant dans l'épaisse fumée blanche que j'expirais et qui créait au dessus de nous un nuage éphémère avant de se désintégrer petit à petit. J'écrasais le mégot dans le cendrier sur la table de chevet alors qu'elle me posait une nouvelle question. « Tu crois qu’ils arriveront.. à leurs fins ? Avec nous je parle. » je tournais lentement la tête vers elle, un sourire en coin sur les lèvres. Elle se demandait si on allait finir ensemble. Je ne savais pas trop comment prendre cette question et je n'avais aucune idée de quoi lui répondre. J'aurais peut être du la rassurer, lui dire que si on finissait ensemble, ce serait notre choix et pas le leur... Ou bien peut être que je devrais lui dire que non, que ça n'arrivera pas. J'ai l'impression que c'est ce qu'elle veut entendre. Je passais alors ma main à l'arrière de sa tête, traversant sa chevelure blonde, je me penchais vers elle pour l'embrasser sur la tempe. « Qu'est-ce que tu veux que je te dise Drizzle ? J'ai pas envie de te dire non, et j'ai pas envie de te dire oui. Je comprends bien que t'as peur de finir avec un type comme moi, et je t'y obligerais pas si c'est pas ce que tu veux. » Ma main descendit le long de son dos et je décidais de rester près d'elle, sans pour autant en abuser. « Mais j'ai pas l'impression que tu sois comme toutes ces filles qui rêvent absolument.. de vivre d'amour et d'eau fraîche. J'me trompe ? »

Ton regard se fait beaucoup plus vague, et tu fixes sa cigarette en train de se consumer avec un soudain intérêt. Tu ne sais pas vraiment pourquoi tu lui dis tout ça, mais il te parait étonnant de voir à quel point tous les deux vous n’étiez pas si éloignés que cela. Que vous vous compreniez en quelque sorte. Depuis le début, tu tiens peut-être à cultiver vos différences, montrer que vos comportements, vos pensées, vos aspirations étaient distincts. Au fond, d’un certain point de vue, vous sembliez plutôt similaire. Au moins sur votre famille. Mais toi tu te contentes de faire comme si tout allait bien. Parce que tu n’as pas la force d’entamer un conflit d’une telle envergure. Au moins pour ta sœur et parce que tu n’as pas envie qu’elle souffre de ce manque plus qu’elle ne doit le faire déjà. A vrai dire, vous n’abordiez que très peu le sujet. Vous ne cherchiez pas vraiment à en discuter toutes les deux. Dale au contraire préférait laisser couler, disant qu'il n'y avait rien à faire de plus. Tu hausses légèrement les épaules. Que pouvais-tu réellement dire ? Tu n’étais pas du genre à lâcher un, « ça va aller » ou un « ça va s’arranger » rien que pour meubler la conversation, tout en sachant que le problème était bien plus profond. Tu gardes simplement le silence avant de reprendre, peut-être même plus pour toi-même que pour lui, à quel point il serait impossible d’en toucher un mot à ton père. Un dialogue de sourd. Ça te fait bien plus de peine que tu ne le laisses paraitre d’ailleurs. Il te dicte ta vie. Au fil des années, tu aurais dû peut-être t’y habituer mais plus tu avançais, plus la situation te paraissait étouffante. Si tu n’étais pas attachée à Oceanside, tu serais certainement repartie à Sydney même temporairement, mais pour y faire quoi ? Rien de plus qu’ici, probablement. Tu soupires un peu, ayant l’impression de tourner en rond. Alors, presque inconsciemment, tu abordes un sujet qui vous concerne tous les deux, lui demandant ce qu’il pourrait se passer si vos parents en arrivaient à leurs fins. Tu remarques son sourire en coin et sens subitement ses lèvres sur ta tempe. « Qu'est-ce que tu veux que je te dise Drizzle ? J'ai pas envie de te dire non, et j'ai pas envie de te dire oui. Je comprends bien que t'as peur de finir avec un type comme moi, et je t'y obligerais pas si c'est pas ce que tu veux. » Tu sens sa main glisser lentement le long de ton dos. Tu ne savais pas vraiment ce que tu voulais entendre de sa part. Est-ce que oui ou non tu flippais de finir ta vie avec lui ou pas. Tu n’appellerais même pas ça de la peur. Non, ce n’était pas ce que tu ressentais. Tu te demandais seulement comment ça se passerait, comment vous réagiriez. « C’est pas ça Dale. Pour être franche, oui au début, ça me faisait surtout chier qu’on m’impose de te fréquenter toi, mais ça tu le sais déjà. C’est juste que, ça m’énerverait de voir mon père diriger une fois de plus mon avenir. » Tu commençais à être lasse, fatiguée de te poser autant de questions en l’espace d’une seule soirée. Tu te laisses presque aller contre lui, contre son épaule en fermant les yeux sans mesurer tes gestes. Parce que peut-être te dis-tu que le lendemain tout sera presque oublié, alors qu’en fait, non. « Mais j'ai pas l'impression que tu sois comme toutes ces filles qui rêvent absolument.. de vivre d'amour et d'eau fraîche. J'me trompe ? » Cette remarque te fait légèrement sourire. « Non, tu ne te trompes pas. Tout cet amour gnangnan et mielleux me rebute un peu. J’sais pas, je pense que j’aurais du mal à vraiment vivre que pour une seule personne et à ses dépends comme ça. Mais c’est si mal que ça ? »

Elle me répondit que je n'étais pas le problème, si elle ne souhaitait pas finir avec moi, si toute fois les choses allaient dans ce sens, c'était car elle ne voulait pas suivre le chemin que son père avait tracé pour elle. J'avais souvent eu l'occasion de discuter avec Mr Burrows, du moins lors des diners qui étaient organisés par nos parents dans le but de se voir mais surtout de nous rapprocher Drizzle et moi, il m'avait semblé être un homme bien, ambitieux surtout, qui sait ce qu'il veut. Il me parlait toujours avec assurance et se préoccupait de mon avenir. Je savais qu'au fond il n'en avait rien à foutre, il espérait tout simplement que je suivrais les traces de mon père, du moins financièrement. Il se fichait de ce que j'allais faire tant que j'aurais de l'argent pour entretenir sa fille. Malheureusement, Drizzle était de ces héroïnes romanesques féministes qui ne souhaitent pas se faire dicter ce qu'elle avait le droit de faire ou non. Sans être totalement aventurière, elle rêvait d'une liberté sans fin. Mais pourquoi faire ? Serait-elle plus heureuse ainsi ? Avait-elle des rêves si grand qu'ils nécessitaient que son père s'évince ? Si je me confortais dans le luxe que ma situation me permettait, Drizzle au contraire, semblait vouloir voir beaucoup plus loin que ce cocon superficiel et matérialiste dans lequel nous étions emprisonné. Si ce n'était que ça, elle n'avait qu'à aller sauver quelques baleines et donner de l'argent à WWF pour la survie des pandas. Elle aurait la conscience tranquille. « Non, tu ne te trompes pas. Tout cet amour gnangnan et mielleux me rebute un peu. J’sais pas, je pense que j’aurais du mal à vraiment vivre que pour une seule personne et à ses dépends comme ça. Mais c’est si mal que ça ? » m'interrogea-t-elle encore, comme si j'avais réponse à tout. Elle devait pourtant savoir que je n'étais pas une référence dans le domaine des sentiments. J'étais loin d'être très réceptif, seul le malheur de ma mère semblait réellement m'atteindre, celui des autres ne me faisait pas grand chose. Les enfants qui mourraient de faim ? Et alors ? Les clochards qui mendiaient au centre ville désireux d'obtenir quelque chose qui leur permettrait de survivre ? Non. Je ne les plaignais pas. Je jugeais que chacun était le maître de son destin. Chacun était capable de décider et d'agir selon ses envies. Les clodos n'allaient qu'à aller travailler comme tout le monde. Mais Drizzle me posait une colle. Qu'étais-je supposé lui répondre ? Que savais-je de l'amour après tout ? Tristement rien. Je lui répondis donc dans un soupir, lui laissant ainsi comprendre ma grande ignorance sur le sujet « Je sais pas Drizz... » Je m'allongeais à nouveau sur le matelas et l'attirais près de moi, mon bras passant autour d'elle, je tournais le visage vers elle pour observer ses traits à peine visible dans la nuit. Je m'approchais et déposais un baiser sur ses lèvres. Pas un de ces baisers habituels que je me plaisais généralement à lui donner, ceux qui sous-entendait " déshabille toi maintenant " c'était comme si, après cette discussion, je la rencontrais pour la première fois et que j'étais sincèrement attiré par elle. C'était le cas au final, mais je préférais lui faire croire et entendre qu'elle n'était qu'une fille parmi les autres, juste bonne à assouvir mes désirs. Mais je ne la considérais plus comme tel depuis peu. Elle était vraiment une fille bien. Ce tendre baiser rompu, j'attirais de ma main libre le drap pour nous couvrir. J'avais une idée en tête concernant Mr Burrows mais je ne désirais pas lui en parler tout de suite, je n'avais aucune envie de mettre fin à cet agréable moment et je décidais donc de lui en parler le lendemain. « Bonne nuit alors... »

La conversation dérivant en quelque sorte sur les relations amoureuses, tu lui avoues que les grandes et étouffantes démonstrations de tendresse dégoulinantes d’amour n’étaient pas spécialement ce que tu affectionnais. Vivre aux dépends de quelqu’un à vrai dire, tu avais du mal. Peut-être que le temps te changera, te fera voir cela sous un autre angle, mais pour le moment, ce n’était pas dans tes priorités. Tout du moins, tu n’avais jamais réellement aimé quelqu’un à rester vingt-quatre heures sur vingt-quatre collée à lui ou à ton portable pour savoir ce qu’il faisait et avec qui. Tu ne pouvais pas savoir, jusqu’au moment où cela te tomberait vraiment dessus. Tu t’étais déjà attachée dans le passé, mais finalement ça finissait toujours plus ou moins mal, te reprochant de ne pas t’investir assez. Tu n’y pouvais rien. Assise à ses côtés, tu lui demandes si au final, c’était si mal de penser ça. A voir certaines de tes amis, il semblerait que oui, mais Dale semble réfléchir un peu. Au fond, tu connais déjà sa réponse. Etait-il capable de s’attacher à quelqu’un ? Ou même, de se soucier d’autrui ? La réponse semble même évidente, ou alors, il arrive à merveilleusement bien le cacher. Vous n’en aviez jamais parlé mais tu t’en doutes fortement. « Je sais pas Drizz... » Il se fait vague, coupant presque court à cette conversation. Tu te demandes le temps d’un instant s’il lui était déjà arrivé au moins une fois de s’intéresser à quelqu’un du sexe opposé. Mais tu te rends compte que peut-être tu parles trop, que tu poses trop de questions alors tu préfères te taire, garder le silence et ainsi éviter de relancer. S’allongeant alors subitement sur le matelas, tu te sens attirée dans sa chute, contre lui, avant qu’il ne passe son bras autour de toi. Vos regards se croisent tout autant que l’obscurité vous le permet, et il pose lentement ses lèvres sur les tiennes. Presque tendrement. Tu n’es pas habituée à ce genre de baiser venant de sa part, parce que les seuls que vous échangez ne signifient rien la plupart du temps. Peut-être celui-ci aussi. Tu n’es pas dans sa tête, tu n’en sais rien. Mais tu le sens simplement différent des précédents. « Bonne nuit alors... » Cette simple phrase te fait sourire. Tu n’es pas réellement fatiguée, tu te sens juste bien et détendue, chose pourtant rare. En général tu es plutôt nerveuse, prête à riposter à chacune de ses remarques. Le fusiller du regard. Mais là, tu ressentais plutôt les effets de deux, trois joints sur ton cerveau et ton organisme. Tu ne cherchais pas à te battre contre lui. T’aurais même tout le temps le lendemain de psychanalyser la situation. Mais pas ce soir. Profiter de ce moment. Contre lui, tu vins poser tes lèves dans son cou. Tu ne t’en sens pas obligée, tu en as envie c’est tout. Sur le moment. Tu le penses lunatique, tu l’es aussi un peu après tout. « Je ne suis pas encore fatiguée. » Tu n’as aucune idée de l’heure. Tard ou non, finalement, tu n’en avais pas la notion. Tu te surélèves un peu, venant embrasser le coin de ses lèvres, puis, s’emparer de nouveau des siennes, avec langueur. Tu ne sais pas de quoi demain sera fait, mais il est fort probable que ton esprit sature. Revenant poser ta tête sur l’oreiller, tu souris, un peu. « Alors bonne nuit ? » Tu réitères ses paroles en question, lui demandant ainsi implicitement ce qu'il désirait faire. Tu ne forces en rien les choses à se passer. Tu laisses faire.

Drizzle me dit qu'elle n'était pas encore fatiguée, je ne sais pas si elle me faisait des avances à ce moment là pour me dire qu'elle préférait que nous nous occupions plutôt que de dormir, mais j'en eus quelque secondes après la confirmation. Elle m'embrassa près des lèvres, je restai allongé sans rien dire, les yeux à moitié clos. J'étais parfaitement réveillé mais je réfléchissais à cet échange avec Drizzle. Nous avions à présent fini de discuter, apparemment,et nous passions à autre chose, comme si c'était tout à fait naturel , comme si nous avions toujours fonctionner comme ça. Elle m'embrassa finalement les lèvres et je répondis sans me faire prier à ce baiser. Elle s'écarta avant de reprendre place sur son oreiller et je la suivis du regard sans vraiment savoir quoi faire. J'avais clairement la flemme de bouger, mais au fond, quelque chose me poussait indéniablement vers elle et j'avais réellement envie de m'approcher d'elle. « Alors bonne nuit ? » lança-t-elle sur un ton qui se voulait volontairement amusé, presque moqueur. Je ne répondis pas, décidant de rester silencieux un moment, je fermais les yeux dans l'espoir de trouver le sommeil et de passer directement à une autre journée. Je ressassais les mots de Drizzle dans ma tête, ce qu'elle m'avait raconté sur son père, et puis je pensais finalement à ce que je lui avais dit sur moi. J'avais bien compris qu'elle n'était pas ravie à l'idée que nous aillons à nous voir, son père le lui imposait et elle n'y trouvait aucun plaisir. Elle m'avait même repoussé dans la limousine, me disant qu'on ne ferait rien ce soir car elle n'était pas là pour assouvir mes désirs. Je soupirais sans vraiment m'en rendre compte et réfléchissais à l'idée que j'avais eu... Je n'étais pas connu pour agir dans l'intérêt des autres, mais je trouvais quelque chose d'attachant dans la détresse de Drizzle face à son père. Peut être car elle me faisait penser à ma mère, en moins pire, mais Drizzle avait encore une chance d'être heureuse, elle avait encore toute la vie devant elle, ma mère se savait condamner car elle n'aurait jamais le courage de laisser mon père. Bref, de tout ce que Drizzle m'avait dit et fait comprendre, une idée simple mais très intelligente avait germé dans mon esprit. Puisqu'elle n'avait aucune envie d'être obligée à me voir par son père, je n'avais qu'à faire passer l'envie à Mr Burrows de voir sa fille me fréquenter. Tout le monde serait content. Après plusieurs longues minutes de silence et de réflexion, je tournais donc la tête vers Drizzle. « Oué. Bonne nuit. » Je me tournai de l'autre côté, dos à Drizzle. Je décidais de ne pas aller plus loin avec elle, nous en avions déjà fait assez et je n'avais pas envie de coucher avec elle, aussi attirante soit-elle. Je fermais alors les yeux dans l'espoir de m'endormir réellement.