Lucas s'installa tranquillement sur le bord de son lit, un médiator entre pouce et index glissant avec la dextérité offerte par une pratique quotidienne, sur les cordes tendues de sa guitare durement acquise. Les doux accords délivrèrent leurs sonorités apaisantes à travers le silence ambiant, virevoltantes de manière frivole jusqu'à ses oreilles attentives à la moindre erreur. Un sourire étira les lèvres de l'adolescence tandis qu'une agréable sérénité intérieure envahissait son être. C'était l'effet que produisait généralement la musique sur son mental lorsqu'il était seul. La musique. C'était probablement son unique moyen d'expression lorsqu'il n'était pas en présence de sa jumelle. Lui qui maniait si aisément les mots pour discourir se retrouvant mis en échec lorsqu'il s'agissait de s'exprimer sur ses propres émotions. Les chansons étaient composées de paroles bien plus intenses qu'il ne pourrait jamais tenter de formuler de lui-même et, pouvoir utiliser les mots d'un autre le rassérénait quelque peu. D'une part pour les raisons déjà exprimées plus haut et d'autre part, parce que l'on ne se soucierait pas de l'associer à la chanson concernée, ainsi il ne se révélait pas complètement. Qui l'eût-cru, être musicien avait ses propres risques et périls. Luke s'interrompit et déposa précautionneusement l'instrument sur son matelas. Il ouvrit sa fenêtre après avoir traversé la pièce en trois grandes enjambées, et chercha son paquet de cigarette dans le tiroir de son bureau. Il n'avait pas l'habitude de fumer sous le toit de ses parents - son père était formellement opposé à ce genre de consommations. Cependant, l'avis de son père avait récemment atteint la dernière place de ses préoccupations.

Le briquet s'appropria quelques instants avant de daigner enflammer le bout de la clope. Il tira une première bouffée qui enfuma de manière familière le fond de sa gorge. Il ferma les yeux durant une fraction de seconde pour la savourer. Il se souvenait de ses premières cigarettes, lorsqu'il n'était encore qu'un collégien. L'étourdissement qu'elles provoquaient l'avait rebuté à l'époque. Aujourd'hui, il aurait souhaité pouvoir atteindre un résultat comme celui-ci, avec des moyens plus accessibles. L'adolescent tendit l'oreille, écoutant les faibles bruits de leur vie quotidienne. Il perçut de manière lointaine la musique énergique provenant de la chambre de sa sœur ; sinon rien. Seuls les grillons semblaient veiller depuis le jardin de l'habitation, d'où ils émettaient un joyeux concert de crachotements aigus. Sa mère, après avoir passé plusieurs heures à peaufiner les derniers détails de son prochain article avait profité de sa soirée pour sortir avec quelques amies à Burbank. Quant à son père, son cas ne l'intéressait que très peu. Il espérait seulement qu'il soit suffisamment discret pour ne pas laisser deviner la nature de ses activités angelines. Lucas ne savait toujours pas comment agir à ce propos. Et n'avait pas envie d'y penser plus que nécessaire. Il laissa tomber quelques cendres sur le rebord de sa fenêtre et, leva une mine surprise lorsque la porte de sa chambre s'ouvrit soudainement sur la silhouette indésirée. Un sursaut qu'il méprisa aussitôt qu'il l'eût ressenti agita ses entrailles, il déglutit imperceptiblement. Le père et le fils échangèrent un regard éloquent : étonnement, suspicion et finalement conclusion de mauvaises augures. Dès qu'il eût retrouvé ses moyens, Lucas se composa mécaniquement un masque d'impassibilité avant d'écraser le bout de sa cigarette à peine consommée, à contrecœur. Il se redressa, dos droit et menton haut, afin d'affronter les remontrances paternelles qu'il était certain de voir pleuvoir d'une seconde à l'autre.

Ça ne tarda pas. Lucas observa distraitement un point fictif au-dessus de l'épaule de son père, peu attentif au discours que celui-ci lui délivrait à grand renfort de gestes expressifs. « ... irrespectueux, je ne veux pas d'un drogué sous mon toit » conclut-il, les joues rouges. L'indifférence qui jusqu'alors empêchait l'émergence de tout sentiment houleux, fût soudainement chassée par une colère sourde, se dressant en lui comme un serpent prêt à mordre. « C'est moi qui suis irrespectueux ? » rétorqua-t-il en pointant un doigt accusateur sur la poitrine de l'époux infidèle. Un court instant de flottement naquit entre les deux hommes Woodward. « Tu me dégoutes » cracha-t-il le regard hargneux. Le revers de son paternel se décocha. Luke tituba légèrement sur le côté, la pommette cuisante, ahuri. Son père lui-même ne semblait pas réaliser la réalité de son propre geste. Lucas se renfrogna. « Très bien ». Il s'empara de sa veste en cuir qu'il enfila d'un mouvement fluide avant de repousser son père sur le côté. Il entendit la porte de sa sœur s'ouvrir sur son passage et il s'immobilisa durant un instant, déchiré entre l'envie de se réfugier chez elle et apaiser ses interrogations qui la maintiendraient à l'écart de la vérité, et celle de partir sur-le-champ. « Ne te mêle pas de ça Pal' » lâcha-t-il d'une voix qu'il aurait souhaitée plus délicate. Les pas du paternel les rattrapèrent promptement et soudainement, ils s'entreregardèrent dans un parfait ensemble. « Tu ne quitte pas cette maison jeune homme » déclara-t'il finalement, une crainte sourde dans la voix, incertaine.

« HEY I JUST MET YOU AND THIS IS CRAAAAAAZY ! BUT HERE'S MY NUMBER ! SO CALL ME MAYBE ! IT'S HARD TO LOOK RIGHT AT YOU BAAAAAAAAABYYYY BUT HERE'S MY NUMBER ! SO CALL ME MAYBE !! » s'égosiait Paloma Woodward sur la musique qui résonnait dans sa chambre. Vêtue d'un short et d'un t-shirt, sa tenue de sport habituelle, elle pratiquait ses heures de gym quotidienne. Un tapis de sport posé devant elle, la blonde répétait de nombreux mouvements d'échauffement et d'assouplissement dans le but de brûler les calories emmagasiner durant la journée et de garder une forme et un corps OLYMPIQUE. Une bouteille d'eau à moitié vide posée sur le sol à côté d'elle, elle était assise sur le sol, les bras tendus vers l'avant, attrapant ses chevilles, lorsque la voix de son père retentit au loin. Elle la reconnaissait entre mille, son père qu'elle adorait tant, il était un modèle pour elle et elle profitait des rares instants où il était là, lorsqu'il rentrait à Oceanside, pour passer du temps avec lui, d'ailleurs, ils avaient prévu d'aller au cinéma ce soir là pour voir un film ensemble. A défaut de ne plus très bien s'entendre avec Lucas, Mr Woodward ne refusait jamais un moment avec sa fille et Paloma se sentait alors privilégiée, heureuse... Elle ne savait pas réellement ce qu'il se passait entre Lucas et son père, cela dit elle décidait de jouer les sourdes oreilles car la situation lui convenait et qu'elle n'avait donc pas à partager les faveurs de son paternel avec qui que ce soit, elle l'avait pour elle toute seule. Elle se disait alors simplement que Lucas faisait sa crise d'adolescence, rien d'alarmant.. Il n'était pas rare que des conflits naissent entre parents et enfants à cette période, et jamais Ô grand jamais elle ne se doutait de ce qui pouvait réellement se cacher sous cette bataille qu'ils se livraient l'un l'autre chaque week-end lorsque Mr Woodward père rentrait au domicile familiale.
Elle décida de baisser un peu le volume de la musique, curieuse de savoir ce qu'il se tramait de l'autre côté de la maison, curieuse de savoir pourquoi son père haussait soudainement la voix. Définitivement rongée par la curiosité, elle entrouvrit la porte de sa chambre et glissa la tête dans l'entrebaillement pour voir ce qu'il se passait. Au fond du couloir, la silhouette de son père, haute, charismatique.. Il fut alors dépassé par Lucas qui, sortant de sa chambre d'un pas rapide le dépassa, apparemment énervé et bien décidé à s'en aller. Il arriva à la hauteur de la jeune fille, sa jumelle, qui, sidérée, ouvrit la bouche pour prononcer quelques mots, il la coupa, lui ordonna sèchement de ne pas se mêler " de ça ".. elle haussa les sourcils, légèrement sonnée par la brutalité avec laquelle son frère s'adressait à elle. Leur père arriva, interdit à Lucas d'aller ou que ce soit... Elle saisit alors l'avant-bras de son frère et le tira sans un mot à l'intérieur de sa chambre. Elle ferma la porte au nez de son père, la vérouilla en espérant qu'il n'insiste pas, et elle se tourna vers Lucas. « Qu'est-ce qui vous arrive à tous les deux ? Et n'essaye pas de fuir. Tu restes ici et tu m'expliques pourquoi t'es constamment énervé contre lui. Qu'est-ce qu'il t'a fait ? Hein ? »

Les yeux de l'adolescent s'écarquillèrent sous la surprise lorsqu'il sentit la poigne vigoureuse de sa sœur jumelle se refermer sur son avant-bras. Avant qu'il n'ait eu le temps de songer à opposer la moindre résistance, Paloma l'attira sans ménagement dans sa chambre, verrouillant la porte derrière leur passage. Une mine de protestations se dessina sur les traits du musicien ; durant un court instant, il envisagea de repousser sa sœur afin de se frayer un passage et quitter cet endroit qui lui était apparu si tentant quelques instants plus tôt. Toutefois, les poings sur les hanches associés à une moue déterminée, la joueuse de lacrosse semblait s'être transformée en obstacle impossible à dépasser. Si Lucas avait plus tôt pensé que cette soirée ne pouvait pas s'aggraver, le destin avait dû prendre cette réflexion comme un challenge d'effronté ; car soudainement, il se retrouvait les deux pieds dans le pot, piégé. La question fusa des lèvres de la jeune femme, cassante. La pointe de reproche qu'il discerna dans le ton de celle-ci le rembrunit instantanément. Il n'appréciait certainement pas cette habitude qu'elle avait de placer leur père sur un piédestal, comme s'il était parfait en toutes circonstances, comme s'il n'avait jamais commis la moindre erreur ou n'avait strictement rien à se reprocher. Comme s'il n'était ni le mari infidèle, ni le père absent qu'il était aux yeux de son fils. « Et moi j'aimerais savoir pourquoi tu es toujours là à prendre sa défense comme si c'était moi le responsable » éluda-t-il en désignant le panneau de la porte d'un grand geste de la main énervé.

« Maintenant pousses-toi Pal ; va te poser devant la petite sirène deux avec le père de l'année, j'ai d'autres adultes à emmerder, apparemment c'est ce que je fais de mieux. » Ajouta-t-il sarcastiquement, s'aventurant sans scrupule sur les voies de l'injustice gratuite, amère. Elle ne s'éloigna pas d'un quart de millimètre, ce qui eut le don de l'exaspérer. Il lâcha un chapelet de jurons familiers étouffés, tandis que quelques coups étaient portés de l'autre côté de la porte. « Ma chérie, ouvre la porte s'il te plaît. » quémanda la voix douce du traître en provenance du couloir. Lucas tourna le dos à sa sœur et s'avança dans sa chambre, s'appropriant un peu de distance afin de se tranquilliser un minimum. Il n'avait clairement pas envie d'entrer en conflit avec elle - surtout pas pour ça. Lucas passa une main dans ses mèches désordonnées, les repoussant en arrière. Il ne savait pas comment il parviendrait à se dépêtrer de cette situation. Il s'était promis de ne révéler le pot aux roses qu'en dernière nécessité. Paloma était bien trop proche de leur père pour encaisser la nouvelle - elle le prendrait encore plus mal que lui. « Écoute, je n'ai pas envie qu'on en parle, ni maintenant ni plus tard. Oublie. » Déclara-t-il, en dernier recours.

« Et moi j'aimerais savoir pourquoi tu es toujours là à prendre sa défense comme si c'était moi le responsable » lui dit-il avec reproche. Paloma Woodward haussa les sourcils, profondément blessée par le ton employé par son frère à son égard alors qu'elle n'avait absolument rien demandé. Elle ne comprenait pas pourquoi il s'en prenait subitement à elle alors qu'elle tentait de comprendre la situation, et elle ne défendait pas son père, elle ne prenait même pas parti, si ça avait été le cas elle aurait dit depuis bien longtemps à Lucas d'arrêter ses conneries, là, non, elle voulait simplement comprendre. Silencieusement, postée devant la porte, elle fixait son jumeau, lui coulant un regard perdu et vexé à la fois. Elle était déçue par son comportement, il était énervé, ok, elle comprenait, mais de là à s'en prendre à elle? Elle aurait préféré qu'il se calme un petit peu, qu'il mette sa colère de côté en sa présence.. Mais définitivement, elle voyait qu'il y avait quelque chose qui clochait. Elle ne savait quoi, mais il s'était passé un truc entre son paternel et Lucas qui faisait qu'aujourd'hui, leur relation en était au point mort et c'était bien malheureux. Après tout, on avait qu'un seul père, et elle se demandait ce que celui ci avait bien put faire pour mettre Lucas dans un tel état. « Maintenant pousses-toi Pal ; va te poser devant la petite sirène deux avec le père de l'année, j'ai d'autres adultes à emmerder, apparemment c'est ce que je fais de mieux. » intriguée et à nouveau blessée par les propos de son frère, elle sentit sa gorge se serrer et elle se demanda pendant quelques secondes si elle allait se mettre à pleurer. Les disputes avec Lucas étaient rares, inexistantes en fait et elle n'avait clairement pas l'habitude de l'entendre lui parler ainsi, elle en prenait un coup, un sale coup.. C'était comme si tout s'effondrait autour d'elle. Lucas lui tournait le dos alors qu'ils s'étaient toujours tout dit, qu'ils avaient toujours tout partagé. La voix de son père traversa alors la porte, il était mielleux, doux, et lui demandait délicieusement d'ouvrir la porte. Elle secoua la tête. « Non non non. » articula-t-elle fiévreusement, la voix légèrement tremblante. Elle releva les yeux vers Lucas qui, borné, lui fit savoir qu'il n'avait aucune envie " d'en parler " avec elle et qu'elle ferait mieux d'oublier. Impossible, il en avait bien trop dit à présent et il fallait qu'elle sache, par tous les moyens. Il fallait qu'elle lui tire les vers du nez. Elle s'approcha alors de son frère et l'enlaça tendrement, pensant que c'était peut être le seul moyen pour qu'il se calme et c'était ce qu'il fallait avant tout car elle ne voulait plus entendre sa voix dure et méchante sévir sur elle. « Calme toi Luke... Ça n'arrange rien.» elle soupira et le serra contre elle, comme pour lui insuffler son calme intérieur. Elle leva doucement la tête vers lui. « Dis moi pourquoi tu lui en veux.. Ça me tue de te voir comme ça.. J'ai besoin de comprendre. »

Le talon du jeune homme entama un concert de tambourinements contre le sol sous l'effet de la contrariété, tandis qu'il joignait ses mains sur sa nuque. Une poigne de culpabilité parvînt toutefois à outrepasser les barrières de son énervement, jusqu'à étreindre impitoyablement sa poitrine, lorsqu'il discerna d'un bref coup d’œil l'expression blessée de Paloma. Il détestait se retrouver dans un état pareil et plus encore, de ne pas réussir à s'en dépêtrer aussi rapidement qu'il l'aurait souhaité pour le bien de sa Paloma et le sien. Lucas n'était malheureusement guère réputé pour son calme olympien, au contraire, son impulsivité lui arrachait souvent les mots qu'il aurait préféré garder pour lui, ou ceux qui ne faisaient que lui traverser l'esprit dans ces moments-là - ceux, qu'il ne pensait pas. Il sentit plus qu'il ne vît la jeune femme s'asseoir à ses côtés et, une vague d'apaisement inespérée déferla subitement sur lui lorsqu'elle l'attira tendrement contre elle. Il n'opposa aucune résistance - celle-ci aurait été futile ! - et se laissa complètement aller contre sa poitrine, tandis que la sienne lui semblait peser des tonnes.

Il demeura silencieux durant quelques instants, profitant de ces quelques secondes pour recouvrir la paix intérieur que sa sœur lui communiquait ; elle ne pourrait qu'être nécessaire et bénéfique dans les minutes qui allaient suivre. Le brasier de son emportement s’essouffla progressivement ; il se réduit jusqu'à devenir braises. Lucas inspira profondément, le parfum agréable de sa sœur lui chatouillant les narines. Il aurait préféré ne pas avoir à troubler plus encore cet instant. Il aurait préféré rester ainsi dans l'étreinte de sa sœur, sans qu'elle n'attende d'explications. Explications qu'il ne désirait en rien partager. « Je suis désolé » s'excusa-t-il en se redressant doucement, tout en se passant une main sur le visage. Il marqua une pause supplémentaire, déglutit. L'insupportable vérité était souvent plus difficile à proférer que de simples mensonges. Et encore, lui-même n'était qu'un piètre menteur. « Tu n'as jamais envisagé la possibilité que papa ... ne sois pas à Los Angeles uniquement pour son job ? » l'interrogea-t-il, les yeux brillants. Il darda son regard dans le sien, cherchant à démêler dans les pupilles océanes de sa sœur, les émotions troubles que sa question pouvait susciter. Il ne serait pas étonné qu'elle réponde par la négative. Lui-même, avant d'en être le malheureux témoin, n'aurait jamais soupçonné pareille attitude chez l'homme de la maison. Mr. Woodward, père de famille, mari et catholique de pratique, trompait sa femme. Une nausée l'envahit, comme à chaque fois qu'il songeait aux semaines durant lesquelles leur père s'évadait à LA en prenant son propre job pour prétexte. « Tu devrais le laisser entrer. C'est à lui de te dire ça en face. » finit-il par déclarer, en posant son regard sur le battant. Il pouvait presque percevoir la respiration saccadée de son paternel de l'autre côté. Le cœur battant, une sueur froide sur le front. Il pressa la main de sa soeur entre ses propres doigts.

Lucas s'excusait. Elle le pardonnait instantanément car elle était incapable de lui en vouloir plus de trois secondes, ou pour l'instant en tout cas.. Il ne lui avait jamais rien fait de mal, il était son jumeau, sa moitié, elle n'imaginait clairement pas de vivre sans lui ou de faire quoi que ce soit sans lui.. ou pire, contre lui. Elle lui vouait une loyauté scandaleuse, une confiance sans limite qu'elle ne remettrait jamais Ô grand jamais en question. Elle n'appréciait pas les filles qui lui tournaient autour, n'en jugeant aucun assez bien pour son frère qu'elle adulait tant. Il en était de même avec son père, il était pour elle un modèle et elle ne pouvait imaginer avoir un meilleur père, il les aimait tous les deux.. Même si sa relation avec Lucas s'était récemment dégradée pour des raisons qu'elle n'allait pas tarder à connaître, elle savait qu'il les aimait, lui autant qu'elle, ils étaient ses seuls enfants, sa progéniture chère à son coeur, ses jumeaux inséparables connectés par un lien indélébile avec les années, inébranlable. Mr Woodward travaillait dur pour gagner sa vie et entretenir le foyer familial, mais apparemment, il n'était pas aussi irréprochable que la jeune fille se bornait à le croire. Lucas évoqua la possibilité que leur paternel ne restait pas à Los Angeles uniquement pour son travail, il lâchait entre les mains de la jeune fille une véritable bombe prête à exploser d'une seconde à l'autre.. L'effondrement d'un idéal, comme si soudainement, tout ce qu'elle avait put croire n'était fondé que sur un mensonge.. Comme s'il n'était en fait qu'une imposture, l'ombre de lui même.. Le reflet parfait du père rêvé mais intérieurement souillé par le vice. Paloma plissa les yeux, tentant de comprendre les allusions et le sous entendu que tentait de lui faire parvenir son frère par la simple phrase qu'il avait lâché. Quoi? Mais pour quoi d'autre que le travail leur père resterait-il à Los Angeles ? Elle tenta de trouver des éléments dans le comportement de son père, des appels nombreux d'une femme lorsqu'il était à Oceanside en week-end, celle qu'il disait être sa secrétaire qui prenait en charge ses affaires n'était peut être pas sa secrétaire en fait ? Elle essaya alors de retrouver dans sa mémoire, la relation qu'entretenait ses parents.. Et si réellement.. Il se trouvait que Mr Woodward avait une maîtresse alors il était sûr que leur mère était aussi ignorante que Paloma sur le sujet. Toutes les deux avaient-elles alors été bernées, sans scrupule, par l'homme qu'elles aimaient ? Il y avait bien longtemps qu'elle n'avait pas vu ses parents se démontrer de la tendresse, si Mme Woodward elle, semblait toujours éperdument amoureuse de son mari, alors il n'en était peut être pas de même pour celui ci qui était toujours distrait par son travail.. ou par autre chose finalement ? « Tu devrais le laisser entrer. C'est à lui de te dire ça en face. » ajouta-finalement Lucas en pressant les doigts de la blondinette dans sa main.. Elle eut alors l'impression qu'on venait de lui donner une énorme claque et elle s'en trouva toute étourdie, le regard perdu, presque vide, embué de larmes, sa gorge retenant un sanglot qui n'allait sans doute pas tarder à éclater « Tu mens. » articula-t-elle, se sentant soudainement fiévreuse. Elle se dirigea presque à l'aveuglette vers la porte, la vue troublée par les larmes qui commençaient lentement à descendre le long de ses joues. Elle ouvrit la porte pour découvrir derrière son paternel. Il l'observa une seconde avant de lever les yeux vers Lucas pour lui couler un regard accusateur avant de rebaisser les yeux vers sa fille brisée. Elle put lire dans ses yeux et dans le regard qu'il avait lancé à son frère " tiens, regarde ce que tu as fait, regarde à cause de toi" comme si celui ci était le fautif de toute l'histoire. Elle comprit alors que tout ça était vrai puisqu'il ne tenta pas vraiment de se justifier avant qu'elle ne prenne elle même la parole « Il ment. Dit moi qu'il ment.. » dit-elle en passant le revers de sa main sur son visage trempé de larmes. Il s'approcha, tendit le bras vers elle dans une tentative pour l'enlacer, elle se recula, dégoûtée à l'approche de celui qui venait de perdre toute crédibilité. « Ecoute Paloma, tout le monde fait des erreurs... Et il arrive que les couples... ne durent pas toute la vie.. Tu l'apprendras par toi même avec le temps. » se justifia-t-il. Elle n'enregistra pas la totalité de ses mots, encore trop retournée par ce qu'elle venait d'apprendre.. « T'as tout gâché. » répondit-elle, presque simplement, sa tristesse faisant alors place à de la colère, ses larmes se calmant. Elle retourna dans la chambre, claquant à nouveau la porte au nez de son père, ne souhaitant voir personne. Sauf Lucas qui était toujours là. Elle se tourna vers son frère, déglutit, prit la parole une nouvelle fois « J'arrive pas à croire que tu m'aies rien dit.. T'as gardé ça pour toi.. Tout ce temps ? Pourquoi tu l'as couvert ? Tu croyais que ça se saurait jamais ? Tu préfères que ça se sache pas ? Imagine... quand maman va l'apprendre... Parce qu'elle va l'apprendre.. On peut pas... ne rien dire. Elle mérite pas ça. »